La Fontaine, une école buissonnière d'Erik Orsenna

D'Erik Orsenna, j'ai lu les livres consacrés à la grammaire "La grammaire est une chanson douce", "La révolte des accents", "Les chevaliers du subjonctif". 

Voici donc un livre sur La Fontaine, surtout connu pour ses contes, mais il a écrit bien d'autres choses. 

Orsenna nous livre ici une biographie du fabuliste, mais pas seulement. Il nous parle aussi d'Histoire, des contemporains du poète, comme Boileau, Molière ou Racine. 

Il nous raconte comment La Fontaine s'est retrouvé sans le sou alors qu'il venait d'une famille aisée. Il nous parle de ses amours, de ses infidélités en amour, de sa fidélité en amitié...

Le récit est ponctué d'extraits de ses oeuvres et se termine avec quelques fables plus ou moins connues. 

Un livre pour mieux connaitre le grand auteur que fut La Fontaine. 

Je ne résiste pas à l'envie de retranscrire ici un conte de LF. Je suis sûr que vous ne le connaissez pas... Il s'intitule "Les lunettes". 

"Jadis s'était introduit un blondin
Chez des nonnains à titre de fillette"

Bon, ça commence mal, mais Orsenna a traduit : "Un jeune garçon s'était glissé dans une abbaye de femmes, en se faisant passer pour une novice. 

"Le galant passa pour soeur Colette
Auparavant que la barbe lui crût.
Cet entre-temps ne fut sans fruit : le sire
L'employa bien : Agnès en profita.
Las, quel profit ! J'eusse mieux fait de dire
Qu'à soeur Agnès malheur arriva. 
Il lui fallut élargir sa ceinture; 
Puis mettre au jour petite créature"

Scandale dans l'abbaye! Fureur de la mère supérieure ! 

"Bientôt on mit l'accouchée en prison. 
Puis il fallut faire enquête du père.
Comment est-il entré, comment sorti? 
Serait-ce point quelque garçon en fille?
Dit la prieure, et parmi nos brebis
N'aurions-nous point sous de trompeurs habits
Un jeune loup?"

Une idée vient à la prieure : que tout le monde à l'instant se mette nu, je veux vérifier. Le couvent obtempéra? Y compris le galant. Qui pour ne pas trahir déguisa sa nature. 

"Il est facile à présent qu'on devine
Ce que lia notre jeune imprudent;
C'est ce surplus, ce reste de machine,
Bout de lacet aux hommes excédant. 
D'un brin de fil il l'attacha de sorte
Que tout semblait aussi plat qu'aux nonnains." 

La prieure commence son inspection. Pour ne pas juger du cas légèrement, elle a chaussé ses lunettes. 

"Tout à l'entour sont debout vingt nonnettes,
En un habit que vraisemblablement
N'avaient pas fait les tailleurs du couvent."

Ce spectacle de secrets appas, de touffes de lis et de fermes tétons ne laisse pas insensible notre galant. La machine, vous vous souvenez?, celle qu'il avait si bien dissimulée...

"Elle échappa, rompit le fil d'un coup,
Comme un coursier qui romprait son licou,
Et sauta droit au nez de la prieure, 
Faisant voler ses lunettes tout à l'heure
Jusqu'au plancher."

Il parait qu'un tableau peint la scène et le vol des binocles dans la maison de La Fontaine à Château-Thierry. 

Comments

[Géraldine]

Intéressant, je note... En connaitre plus sur La fontaine n'est pas du luxe, et j'aime beaucoup Orsenna !

[MOUSSE]

J'ai beaucoup aimé ce livre, j'aime cet auteur.

[manou]

J'avais entendu parler de ce livre à sa sortie mais je n'ai pas vraiment envie de le lire pour l'instant, je ne suis que rarement tentée par la lecture de biographies. Merci de nous le présenter plus en détails (je savais que les fables de La Fontaine avaient été écrites avant tout pour les adultes !)

[keisha]

Je ne connaissais pas cette fable plutôt coquine!

[A_girl_from_eart]

Ahaha mais elle est excellente cette fable, je ne la connaissais pas en effet ! Et je ne me serais pas attendue à une telle histoire avec ce titre.

Sinon, toujours pas lu Orsenna mais une biographie de La Fontaine sous sa plume pourrait bien me plaire.